Ostéotomie tibiale de valgisation sur mesure

L’ostéotomie tibiale de valgisation permet de corriger l’alignement de l’axe du membre inférieur et de rééquilibrer les pressions au niveau du genou pour diminuer les contraintes sur zone arthrosique.

L’opération permet de soulager les douleurs de l’arthrose et de freiner l’aggravation des lésions conduisant à terme à la pose d’une prothèse totale de genou.

Qu’est-ce que l’arthrose de genou ou gonarthrose ?

L’arthrose du genou, ou gonarthrose, correspond à l’usure du cartilage et détruit plus ou moins vite tout ou partie de votre articulation.

Cette douleur peut être permanente ou évoluer par poussées. L’évolution en l’absence de traitement, est la persistance ou l’aggravation des douleurs qui deviennent alors invalidantes dans la vie quotidienne mais aussi la nuit. Les conséquences sont des difficultés pour marcher, pour monter ou descendre les escaliers et pour s’habiller. Une restriction des déplacements et des activités sportives et de loisirs peut avoir un retentissement sur la qualité de vie sociale.

L’arthrose peut être localisée uniquement dans la partie interne du genou.

Elle est favorisée par une anomalie de l’axe du membre inférieur (genu varum, « jambes arquées ») responsable d’une mauvaise répartition du poids du corps sur le genou.

En effet, les contraintes de poids s’appliquent plus sur le côté interne, en accélérant l’usure.

Anatomie du genou

anatomie du genou

Le genou relie l’os de la cuisse, le fémur à l’os de la jambe, le tibia.

Le péroné (ou fibula), os parallèle au tibia et la rotule (ou patella) font également partie de l’articulation du genou.

Ces os sont reliés par plusieurs ligaments qui permettent de stabiliser le genou :

  • Les ligaments croisés antérieur et postérieur empêchent le fémur et le tibia de glisser d’avant en arrière.
  • Les ligaments collatéraux interne et externe empêchent le fémur et le tibia de glisser latéralement.
  • La rotule est reliée au muscle de la cuisse par le tendon du quadriceps et au tibia par le tendon rotulien (ou tendon patellaire).

Le genou comprend également deux petits fibro-cartilages, les ménisques, placés entre le fémur et le tibia qui jouent un rôle de stabilisation et d’amortissement.

Les surfaces de contact entre les os sont recouvertes de cartilage qui leur permet de glisser facilement les unes contre les autres.

Genu varum : une déviation de l’axe de la jambe vers l’intérieur.

On appelle valgus physiologique l’angle formé par l’axe du tibia, quasi vertical, et l’axe du fémur, légèrement oblique : un valgus trop prononcé vers l’extérieur (genoux en « X ») est appelé Genu Valgum, l’opposé (« jambes arquées ») Genu Varum.

genou normo-axé : angle HKA 180°

genou normo-axé : la hanche, le genou et la cheville sont alignés, l’angle HKA est de 180°.

genou normo axé : répartition des contraintes

Les contraintes sont réparties :

  • 70% sur le compartiment médial (interne)
  • 30% sur le compartiment latéral (externe)
Genu varum (jambes arquées) : angle HKA inférieur à 180°.

Genu varum (jambes arquées) : l’angle HKA est inférieur à 180°.

C’est la déviation la plus fréquente.

genu varum : contraintes

Les contraintes s’exercent à 100 % sur compartiment médial (interne).

genou après ostéotomie de valgisation

Genou après ostéotomie tibiale de valgisation : l’angle HKA est légèrement supérieur à 180°.

Les contraintes sont réparties de manière équilibrée entre les deux compartiments en favorisant le côté le moins atteint par l’arthrose.

Avant l’opération

Un bilan radiographique complet est réalisé pour confirmer le diagnostic d’arthrose de genou (gonarthrose).

Une mesure des axes des genoux sera réalisée sur des radiographies spéciales (pangonogramme ou gonométrie) afin d’évaluer l’importance de la correction à apporter.

Un scanner ou une IRM peuvent compléter le bilan.

Le scanner permettra de réaliser une planification informatique de l’opération et de faire fabriquer une instrumentation personnalisée.

Ces guides de coupe sur mesure sont imprimés en 3D et à usage unique.

Quand opérer ?

L’ostéotomie tibiale de valgisation permet d’obtenir de bons résultats lorsque plusieurs critères sont remplis :

  • Patient relativement jeune et actif (avant 60 ans).
  • Arthrose débutante (stade 1 ou 2)
  • Genu varum modéré
  • Arthrose limitée au compartiment interne (arthrose fémoro-tibiale interne)

Pour certains patients, la pose d’une prothèse unicompartimentale de genou (PUC) ou d’une prothèse totale de genou (PTG) sont des solutions plus appropriées.

En quoi consiste l’opération d’ostéotomie tibiale de valgisation ?

L’ostéotomie tibiale de valgisation (OTV) est une intervention réalisée sous rachi-anesthésie ou sous anesthésie générale associée à une loco-régionale.

Elle dure en moyenne 45 minutes.

On réalise une incision d’environ 8 cm à la partie interne du genou.

Une coupe (ostéotomie) est réalisée à la scie dans le tibia en préservant une partie intacte pour constituer une charnière osseuse externe.

Les guides de coupe sur mesure permettent de positionner très précisément la scie dans les 3 dimensions de l’espace.

Ils servent également à préparer avec exactitude les trous pour les vis de fixation de la plaque.

Ces PSI Patient Specific Instrumentation (instrumentation spécifique au patient) sont réalisés sur mesure et à usage unique.

Ils permettent une meilleure précision dans le positionnement des instruments de coupe.

Ils offrent un net progrès en matière de sécurité pour le patient (moins de risques d’infections nosocomiales ou d’inflammations post-opératoires liées à des contaminants).

La fente est ouverte en jouant sur l’élasticité de la charnière osseuse.

L’écartement est précisément calculé en fonction de la déformation à corriger.

Une cale osseuse ou synthétique est insérée dans la fente réalisée afin de corriger l’axe.

S’il s’agit d’une cale osseuse, l’os est prélevé au niveau du bassin (crête iliaque).

Ce prélèvement nécessite la réalisation d’une cicatrice sur le bassin généralement du même côté que l’ostéotomie.

Le tibia est alors fixé par une plaque et des vis en alliage de titane.

La technique opératoire utilisée est appelée ostéotomie tibiale de valgisation d’ouverture, ou d’addition interne.

Elle est moins invasive et présente moins d’inconvénients et de risques de complications que la technique par fermeture externe.

Elle ne posera pas de problèmes dans le futur si une prothèse de genou devient ultérieurement nécessaire (et la même cicatrice pourra être utilisée).

    Quels sont les avantages de la technique d’ostéotomie tibiale avec guides de coupe sur mesure ?

    • Matériel à usage unique : moins de risques d’infection
    • Opération plus rapide : moins de pertes sanguines
    • Précision de la coupe osseuse dans les 3 plans de l’espace
    • Positionnement précis de la plaque
    • Alignement optimal de l’axe de la jambe :
      • moins de douleurs post-opératoires liées à un mauvais alignement de la jambe,
      • moins de risques de mauvais appui avec récidive de l’arthrose

    La durée de l’hospitalisation est de 24 à 48 heures.

    Au réveil, la jambe est placée en surélévation et la cryothérapie débutée.

    Si besoin, on place un drain pour limiter l’hématome. Il sera enlevé dès le lendemain.

    Le lever se fait dès le lendemain de l’opération avec l’aide du kinésithérapeute.

    La marche avec des cannes anglaises est possible dès J1 avec un appui soulagé pendant 30 jours.

    On protège le genou opéré avec une attelle à conserver pendant les premières semaines.

    L’appui complet est possible à partir de J+30

    La marche sans béquilles est généralement possible à partir le la 6e semaine.

    La reprise de la conduite automobile s’effectue habituellement à partir de la 6e semaine.

    Arrêt de travail : habituellement 2 mois pour un travail de bureau. 3 à 6 mois pour un travail physique.

    Reprise des activités sportives : elle dépend de l’évolution de la consolidation osseuse et de la récupération ainsi que de l’activité pratiquée.

    Elle est s’effectue habituellement à partir de 6 mois.

    Prévention de la phlébite

    • traitement à suivre impérativement jusqu’à la reprise de la marche avec appui complet. 
      • bas de contention
      • traitement anticoagulant
    • surveillance des plaquettes pendant durant tout le temps du traitement.

    Retrait du matériel

    Le matériau en alliage de titane est bien toléré et la conception des vis enfouies dans la plaque minimise les risques d’irritations.

    La plaque peut donc habituellement être laissée en place sans inconvénients.

    Si besoin, elle pourra être retirée après consolidation totale, normalement après 12 à 18 mois.

    Prise en charge de la douleur

    Les nouvelles techniques d’anesthésie permettent de limiter les douleurs post-opératoires et le traitement antalgique doit être adapté en fonction des douleurs ressenties.

    Les premiers jours, il est nécessaire de prendre les médicaments antalgiques (contre la douleur) de manière systématique sans attendre la survenue de douleur et en respectant le protocole. Il est très important de ne pas laisser la douleur s’installer.

    Les jours suivants, il est possible de diminuer les antalgiques s’il n’y a aucune douleur.

    Pansements et cicatrisation

    Le pansement est à refaire dès le lendemain de l’opération puis tous les 3 jours par un(e) infirmier(e) DE à domicile pendant 15 à 21 jours jusqu’à cicatrisation de la plaie.

    Le pansement prescrit est étanche et permet la douche (mais pas le bain).

    Les sutures employées sont habituellement résorbables.

    Dès que la cicatrisation est complète, il est indispensable d’appliquer une fois par jour la crème cicatrisante, Cicalfate (Avène) ou Bi-Oil sur les cicatrices.

    Consultation de contrôle, 45 jours après l’opération

    Le chirurgien vérifie la consolidation osseuse sur les radiographies de contrôle et s’assure que le genou a retrouvé  des amplitudes de mouvement satisfaisantes. D’autres rendez-vous de contrôle sont ensuite programmés dans la première année avec un accompagnement jusqu’à la reprise du sport souhaité.

    arthromoteur

    Les premiers jours après l’opération

    repos jambe surélevée
    • Repos avec la jambe surélevée
    • La cryothérapie permet de diminuer l’œdème et la douleur et de faciliter la rééducation.L’attelle cryogène Igloo® associe cryothérapie, compression et contention et est particulièrement pertinente dans la phase douloureuse aiguë.Elle devra être utilisée pendant 20 minutes 5 à 6 fois par jour à 2 heures d’intervalle.
    • Bas de contention à porter la journée pendant 30 jours
    • Attelle à porter jour et nuit
    • Cannes anglaises jusqu’à la consultation post opératoire à J45

    Rééducation douce les 6 premières semaines pendant la phase de consolidation de l’os.

    Exercices de rééducation à faire à la maison

    Exercices de mobilisation du genou (prévention de l’installation d’une raideur)

    Extension du genou

    Mobilisation passive :

    Sur le lit, en position couchée sur le dos, le gros orteil pointé vers le haut, laissez l’arrière du genou descendre jusqu’au plan du lit. 

    Mobilisation active :

    Su le lit, en position couchée sur le dos, contracter les muscles comme pour écraser l’arrière du genou.

    Flexion du genou

    Assis bien droit au bord du lit, laisser pendre la jambe à la verticale, sans que le pied touche le sol.

    Si besoin, placer la jambe non opérée sous la jambe opérée pour freiner sa descente et diminuer la douleur.

    Assis sur une chaise, pousser la jambe opérée vers le bas avec la jambe non opérée.

    Rodage articulaire :

    Sur une chaise, le pied posé sur une planche à roulettes, faire des mouvements de va et vient d’avant en arrière.

    Les complications

    Les plus fréquentes

    Comme toute chirurgie, il existe un risque d’hématome qui se résorbe en règle générale tout seul. Une cryothérapie régulière permet de diminuer cette hématome. Lorsqu’il est trop important et devient compressif, une évacuation chirurgicale est exceptionnellement nécessaire.

    La phlébite peut survenir malgré le port de bas de contention et l’administration d’un traitement anticoagulant préventif. Il s’agit d’un caillot qui se forme dans les veines des jambes, celui-ci peut migrer et entraîner une embolie pulmonaire.

    Plus rarement

    La cicatrisation des tissus dans le genou peut créer des adhérences ou des nodules de fibrose cicatricielle qui vont limiter la flexion ou l’extension et engendrer une raideur articulaire. Une intervention d’arthrolyse arthroscopique est alors nécessaire afin de libérer le genou.

    L’algodystrophie est un phénomène douloureux et inflammatoire encore mal compris. Elle est traitée médicalement et peut durer plusieurs mois (voire parfois des années), entraînant une prise en charge spécifique avec rééducation adaptée, bilans complémentaires et parfois prise en charge spécifique de la douleur. Elle est imprévisible dans sa survenue comme dans son évolution et ses séquelles potentielles.

    La survenue d’une infection de l’articulation est exceptionnelle car le geste chirurgical est réalisé sous arthroscopie. Néanmoins cette complication grave (révélée par de la fièvre, des frissons ou un écoulement cicatriciel) nécessite une reprise chirurgicale pour réaliser un lavage du genou ainsi que la prescription d’un traitement antibiotique prolongé.

    Il vous est fortement déconseillé de fumer avant l’opération et pendant la période de cicatrisation, le tabagisme augmentant de manière significative le taux d’infection, de phlébite et de mauvaise cicatrisation de la peau et de non-consolidation osseuse.

    La non-consolidation de l’ostéotomie au-delà de 6 mois (pseudarthrose) peut nécessiter une nouvelle opération.

    En cas de greffe osseuse prélevée sur le bassin, des douleurs ou un hématome peuvent survenir dans les suites postopératoires mais sont de bonne résolution avec le traitement médical.

    Il est important de respecter les consignes post-opératoires donnés par votre chirurgien et par votre kinésithérapeute pour la reprise des activités sportives.

    Le non respect des consignes peut conduire à des complications mécaniques.

    Les nerfs et artères qui entourent le genou peuvent être accidentellement blessés. Cette complication exceptionnelle peut occasionner une douleur, une perte de la sensibilité voire une paralysie de certaines parties de la jambe. En cas de lésion artérielle, une chirurgie vasculaire peut être nécessaire.

    Plus fréquemment une perte de sensibilité de la peau (hypoesthésie) peut persister dans la zone opérée. Celle-ci disparaît ou s’atténue le plus souvent avec le temps et n’entraîne pas de gêne fonctionnelle.

    Les risques énumérés ne constituent pas une liste exhaustive et une complication particulièrement exceptionnelle peut survenir, liée à l’état local ou à une variabilité technique.

    Toutes les complications ne peuvent être précisées, ce que vous devrez comprendre et accepter.

    Votre chirurgien vous donnera toute explication complémentaire et se tiendra à votre disposition pour évoquer chaque cas particulier avec les avantages, les inconvénients et les risques de l’intervention.

    La liste n’est pas exhaustive et une complication particulièrement exceptionnelle peut survenir, liée à l’état local ou à une variabilité technique.

    Toutes les complications ne peuvent être précisées, ce qu’il faut comprendre et accepter.

    Quels résultats attendre d’une ostéotomie tibiale de valgisation ?

    L’ostéotomie tibiale de valgisation par ouverture interne est un traitement efficace, qui soulage les symptômes de l’arthrose avec de bons résultats.

    Une fois la consolidation acquise, ce geste améliore significativement la gêne causée par un trouble d’axe.

    Cette consolidation est acquise après 2 à 3 mois et peut parfois être plus longue jusqu’à 6 mois.

    Le matériel peut être ensuite enlevé (en général 1 an après la chirurgie), ce qui permettra d’obtenir un résultat optimal.

    Parfois l’arthrose continue d’évoluer, dans ce cas l’ostéotomie n’empêche pas la mise en place d’une prothèse de genou.

    Chez les patients jeunes et actifs, cette solution est la plus adaptée. 

    Auteur : Dr Philippe Loriaut, Chirurgien Orthopédiste – chirurgie arthroscopique – pathologies du sport – spécialiste de l’arthrose – chirurgie mini-invasive et percutanée.